Licenciement pour motif personnel
Licenciement pour motif personnel : procédure et motifs |
Contrôle d’alcoolémie et règlement intérieur (Cass. Soc. 4 novembre 2015 n°14-18.574 Point de départ des recherches de reclassement : postérieure à la 2ème visite médicale |
La Cour de cassation étend encore sa nouvelle jurisprudence visant à restreindre le champ du préjudice automatique lorsque l'employeur ne respecte pas certaines de ses obligations.
Pour mémoire, un arrêt de la Cour de cassation en date du 13 avril 2016 (n° 14-28.293) avait jugé qu’un salarié à qui l’employeur remettait tardivement les documents de fin de contrat ne pouvait être indemnisé que s’il rapportait la preuve qu’il avait subi un préjudice.
La Haute juridiction avait ensuite étendu cette solution s’agissant de l’absence de mention de la convention collective applicable à l’entreprise sur le bulletin de paye (Cass.soc, 17 mai 2016, n°14-21.872), ou encore de la nullité d’une clause de non concurrence (Cass.Soc, 25 mai 2016, n°14-20.578),
Dans cette affaire, un employeur avait licencié un salarié sans pouvoir apporter la preuve d’avoir régulièrement convoqué à entretien préalable le salarié.
Les juges du fond avaient bien constaté cette irrégularité mais ont estimé que le salarié ayant bien été présent à l'entretien et assisté, il ne pouvait se prévaloir d’aucun préjudice, argument suivi par la Cour de cassation.
En définitive, le salarié qui désormais argue d'une irrégularité de procédure lors de son licenciement doit prouver le préjudice subi, les juges apprécieront !
Dans cette affaire, une salariée a été convoquée à un entretien préalable à un licenciement. Au cours de cet entretien, la salariée était assistée d’un représentant du personnel. Pour sa part, l’employeur était assisté du responsable de boutique et du chef du personnel.
La salarié a contesté son licenciement et a notamment sollicité une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement. Elle soutenait s’être retrouvée face à un jury et avoir été incapable de se défendre.
Les juges du fond ont débouté la salariée de sa demande indemnitaire en relevant que « l’employeur a la faculté de se faire assister par toute personne appartenant à l’entreprise, dès lors que l’entretien ne se transforme pas en véritable enquête ou procès ». Ils ont également relevé que le témoignage du représentant du personnel qui avait assisté la salariée ne faisait pas ressortir que cette dernière avait été incapable de se défendre.
La Cour de cassation n’a pas été du même avis puisqu’elle a cassé l’arrêt des juges du fond en décidant que la présence aux côtés de l’employeur du responsable de boutique et du chef du personnel avait transformé l’entretien préalable en enquête et avait détourné la procédure de son objet.
Dans des affaires précédentes, la Cour de cassation en avait déjà jugé de même en présence de plusieurs salariés ayant assisté l’employeur au cours de l’entretien préalable d’un autre salarié.
Il convient de noter que cette irrégularité de procédure, si elle donne lieu à des dommages-intérêts, n’affecte pas la cause réelle et sérieuse du licenciement lorsque celle-ci est démontrée.
La loi prévoit qu’en cas d’absences répétées ou prolongées pour maladie, un employeur a la possibilité de licencier le salarié concerné en fondant sa décision sur la perturbation du fonctionnement de l’entreprise du fait de ces absences et de la nécessité de remplacer définitivement le salarié.
Relativement aux salariés protégés, la circulaire n°07/2012 du 30 juillet 2012 ainsi qu’un arrêt ancien du Conseil d’Etat ajoutaient une condition supplémentaire qui était la recherche préalable de reclassement du salarié protégé.
Dans l’arrêt commenté, le Conseil d’Etat en décide autrement en jugeant que l’employeur n’est pas tenu de rechercher un poste permettant le reclassement dudit salarié protégé.
A titre de rappel, l’article L451-1 du CSS dispose qu’aucune action en réparation des accidents et maladies professionnelles ne peut être exercée devant le CPH, laissant ainsi compétence exclusive aux juridictions de la sécurité sociale.
A partir de 2006, la jurisprudence reconnait compétence au CPH en matière de réparation des préjudices liés à la perte d’emploi et à la perte des droits à la retraite cas de licenciement pour inaptitude suite à un accident du travail ou une maladie professionnelle imputable à la faute inexcusable de l’employeur.
Par cette décision du 6 octobre 2015, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en décidant que le salarié ne peut plus demander l’indemnisation des chefs de préjudices résultant de la perte d’emploi et de la perte des droits à la retraite devant le CPH.
La Cour de cassation considère que cette demande d’indemnisation, même consécutive à un licenciement du salarié pour inaptitude, correspond en réalité à une demande de réparation des conséquences de l’accident du travail ou de la maladie professionnelle.
Enfin à titre de remarque, il reste possible de réparer indirectement le préjudice lié à la perte d’emploi devant le CPH dans le cadre d’une action en licenciement sans cause réelle et sérieuse en cas de constat du non-respect de l’obligation de reclassement. En effet, la réparation de la perte d’emploi sera nécessairement incluse dans les dommages-intérêts alloués pour non-respect de l’obligation de reclassement.
Contrôle d’alcoolémie et règlement intérieur (Cass. Soc. 4 novembre 2015 n°14-18.574)
L’article L1321-4 du Code du travail dispose que « le règlement intérieur indique la date de son entrée en vigueur. Cette date doit être postérieure d'un mois à l'accomplissement des formalités de dépôt et de publicité ».
Pour être licite, le contrôle d’alcoolémie doit être limité aux salariés dont le travail est de nature à exposer les personnes ou les biens à un danger et doit être assorti de garanties pour le salarié telles que la possibilité de demander une contre-expertise et d’avoir la présence d’un tiers lors du contrôle. (Ce test peut être réalisé par l’employeur lui-même)
Dans cette affaire, le règlement intérieur de l’entreprise avait prévu et organisé les modalités d’un test d’alcoolémie au sein de l’entreprise comme l’exige depuis 2002 la Cour de cassation (Cass.Soc. 22 mai 2002 n°99-45.878) et l’employeur avait licencié un salarié en se fondant exclusivement sur l’état d’ébriété constaté par le test d’alcoolémie qui avait été réalisé.
La Cour de cassation a décidé ici que les dispositions du règlement intérieur permettant d'établir, sous certaines conditions, l'état d'ébriété d'un salarié en recourant à un contrôle d'alcoolémie, n'étaient pas opposables au salarié dès lors que l'employeur ne démontrait pas l'accomplissement des formalités relatives au dépôt et à la publicité dudit règlement intérieur. En conséquence, le licenciement reposant exclusivement sur un tel contrôle était nécessairement sans cause réelle et sérieuse.
En l’espèce, un employeur avait demandé à l’inspecteur du travail l’autorisation de licencier un salarié protégé. Postérieurement à cette demande mais antérieurement à l’autorisation de l’administration, le salarié avait pris acte de la rupture de son contrat de travail.
A titre de rappel, lorsqu’un salarié protégé prend acte de la rupture de son contrat de travail et que celle-ci est justifiée, elle produit les effets d’un licenciement nul (absence d’autorisation de l’inspecteur du travail) permettant au salarié d’obtenir une indemnité pour violation du statut protecteur.
La Cour de cassation a décidé dans cette décision que cette indemnité reste due, quand bien même l'administration du travail, saisie antérieurement à la prise d'acte du salarié, a autorisé le licenciement prononcé ultérieurement à cette prise d'acte.
Point de départ des recherches de reclassement : postérieure à la 2ème visite médicale
Dans cette affaire, l’employeur avait convoqué une salariée à un entretien préalable en vue de son licenciement le même jour où celle-ci avait été déclarée inapte dans le cadre de la seconde visite médicale. Il s’en était suivi un licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
La Cour de cassation rappelle ici que seules les recherches de reclassement compatibles avec les conclusions du médecin du travail émises au cours de la visite de reprise (2ème visite) peuvent être prises en compte pour apprécier le respect par l’employeur de son obligation de reclassement.
Cela signifie donc que les recherches de reclassement effectuées antérieurement à la seconde visite médicale déclarant le salarié inapte, ne permettent pas de démontrer que l’employeur a respecté son obligation de reclassement.
En l’espèce, un salarié est licencié pour faute grave, deux mois après l’expiration de sa période d’essai de trois mois, une multitude de fautes ayant été commises notamment au cours de sa période d’essai.
Pour la Cour d’appel, la confirmation du salarié dans son emploi signifiait que l’exécution des prestations durant la période d’essai convenait à l’employeur.
La Haute juridiction censure ce raisonnement et décide que « l'employeur peut, pour fonder un licenciement disciplinaire, invoquer même après l'expiration de la période d'essai des fautes que le salarié aurait commises au cours de cette période».
La Cour de cassation rappelle que l’employeur doit notifier à un salarié, à qui a été proposée une convention de reclassement personnalisée, le motif économique de la rupture de son contrat de travail.