Contact

Droit social

 

 

Flash Info : Droit social - Ressources humaines

 

 

Pour la première fois de longue date, 2018 ne prévoit pas de modification du code du travail. Les entreprises auront donc un peu de répit pour appliquer les nouvelles dispositions issues de la Loi Travail et des Ordonnances Macron (dont la mise en œuvre du CSE), mais également pour gérer les conséquences nombreuses en droit social de la mise en œuvre du lanceur d’alerte, du RGPD et du programme de conformité anticorruption prévu par la loi Sapin 2.  

La notion de charge de travail, le droit à la déconnexion, la prévention des RPS deviennent une préoccupation sociale dont la jurisprudence se fait l’écho ainsi qu’en attestent les jurisprudences sur le forfait jour. Il est donc recommandé de se mettre en conformité par rapport à ses exigences, compte tenu des conséquences financières attachées à l’annulation des conventions de forfait jour. Nous sommes sur ce point comme sur les autres à votre disposition pour continuer à vous accompagner en 2018.

L’équipe de droit social du cabinet Franck Verdun, Marie Chrystel Pican, Barbara Benosio.

 

 

 

 

CONTRAT DE TRAVAIL : Forfait-jours : effectivité et régularité du suivi des états récapitulatifs mensuels de l’activité du salarié (Cass.soc. 5 oct. 2017 n°16-23.106)

A titre de rappel, la Loi Travail a posé comme principe que :

  • L'employeur s'assure régulièrement que la charge de travail du salarié est raisonnable et permet une bonne répartition dans le temps de son travail (Art.L 3121-60 du Code du travail) ;
  • L'accord autorisant la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours détermine les modalités selon lesquelles l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié (Art. L 3121-64)

Dans cette affaire, la Cour de cassation affirme qu’un accord d’entreprise qui ne prévoit pas un suivi effectif et régulier par la hiérarchie des états récapitulatifs qui lui sont transmis, permettant à l'employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable, n’est pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et n'assure pas une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés. La Cour conclut donc à l’inopposabilité de cet accord aux salariés.

Ainsi les juges considèrent comme insuffisant un accord d’entreprise qui prévoit l’obligation pour chaque salarié de saisir son temps de travail hebdomadaire dans le système de gestion des temps ainsi qu’établir un état récapitulatif du temps travaillé par personne remis à la hiérarchie, celle-ci s’obligeant à effectuer une présentation annuelle au comité de suivi de cet accord.

En revanche, la Cour de cassation avait préalablement jugé suffisantes les dispositions organisant le suivi et le contrôle de la charge de travail selon une périodicité mensuelle par le biais d'un relevé déclaratif signé par le supérieur hiérarchique et validé par le service de ressources humaines, assorti d'un dispositif d'alerte de la hiérarchie en cas de difficulté, avec possibilité de demande d'entretien auprès du service de ressources humaines.

 


CONTRAT DE TRAVAIL : Nullité d’une convention de forfait-jours et suivi trimestriel du temps de travail (Cass. soc. 8 nov. 2017 n°15-22.758)

La Cour de cassation devait ici une nouvelle fois se pencher sur l’épineuse question de la validité d’une convention de forfait au regard du contrôle effectif de la charge de travail.

Les juges affirment qu’un accord d’entreprise relatif à l’organisation du temps de travail - se bornant à prévoir un suivi annuel du temps de travail pour tout collaborateur ainsi qu’un entretien trimestriel « autant que faire se peut », dans le but d’attirer l’attention des collaborateurs dont le suivi présente un solde créditeur ou débiteur trop important afin qu’ils fassent en sorte de régulariser la situation au cours du trimestre suivant - n’est pas de nature à garantir que l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition dans le temps du travail de l’intéressé.

En effet, les juges considèrent que les dispositions de l’accord d’entreprise précité ne permettent pas à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable de travail.

En conséquence, une convention de forfait jours conclue sur base d’un tel accord d’entreprise doit être déclarée nulle avec toutes les conséquences indemnitaires en découlant.

 


CONTRAT DE TRAVAIL : Sort du principe d’égalité de traitement en cas de transfert conventionnel de contrat (Cass. soc. 30 nov. 2017 n°16-20.532)

Dans cette affaire, la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence relatif à la portée du principe d’égalité de traitement à propos du transfert des contrats de travail par voie conventionnelle.

En pratique, il s’agit de l’hypothèse où une entreprise A perd un marché de service qui est ensuite repris par une entreprise B (entreprise entrante), laquelle reprend alors les salariés de l’entreprise A avec maintien des avantages contractuels dont ces derniers bénéficiaient jusque-là.

La question était ici de savoir si les salariés de l’entreprise B pouvaient revendiquer le principe d’égalité de traitement afin de bénéficier des avantages dont bénéficiaient les salariés de l’entreprise A.

La Cour de cassation répond par la négative en affirmant que : la différence de traitement entre les salariés dont le contrat de travail a été transféré et les salariés de l’employeur entrants, qui résulte de l’obligation à laquelle est tenu ce dernier de maintenir au bénéfice des salariés transférés les droits qui leur étaient reconnus chez leur ancien employeur au jour du transfert, n’est pas étrangère à toute considération de nature professionnelle et se trouve dès lors justifiée au regard du principe d’égalité de traitement.

 


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Rupture conventionnelle avec un salarié protégé et compétence de juridiction (Cass.soc.  20 déc. 2017 n°16-14.880)

En l’espèce un salarié protégé avait signé une rupture conventionnelle avec son employeur, ce qui nécessitait donc une autorisation de l’Inspecteur du travail.

Ce salarié a ensuite introduit un recours devant le juge judiciaire afin de contester la validité de la rupture conventionnelle en invoquant une situation de harcèlement moral comme vice du consentement.

Alors que la Cour de cassation avait déjà affirmé l’incompétence du juge judiciaire pour se prononcer sur la validité d’une rupture conventionnelle concernant un salarié protégé, elle réaffirme aujourd’hui ce principe dans l’hypothèse spécifique où le salarié protégé invoque une situation de harcèlement moral pour contester la rupture conventionnelle signée.

 


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Rupture conventionnelle et incidence de la date de demande d’homologation (Cass.soc.  6 déc. 2017 n°16-16.851)

Dans cette affaire, l’employeur avait sollicité l’homologation de la rupture conventionnelle avant l’expiration du délai de rétractation de 15 jours et il y avait eu homologation tacite de la convention de rupture par la Direccte.

Le salarié avait saisi la juridiction prud’homale d’une demande de requalification de la rupture conventionnelle en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La Cour de cassation a rappelé ici qu’une partie à une convention de rupture ne peut valablement pas demander l'homologation de cette convention à l'autorité administrative avant l'expiration du délai de rétractation de quinze jours. Dans le cas contraire, la demande d’annulation de la convention de rupture conventionnelle est justifiée et le salarié est fondé à obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Création d’une entreprise concurrente à son employeur et licenciement pour faute grave (Cass.soc. 30 nov. 2017 n°16-14.541)

En l’espèce, un salarié lié par un contrat de travail avait créé une société dont l’activité était directement concurrente avec celle de son employeur et ce sans en informer ce dernier.

Son employeur l’avait alors licencié pour faute grave et le salarié avait contesté son licenciement devant la juridiction prud’homale.

La Cour de cassation a alors jugé ledit licenciement fondé dans la mesure où le salarié avait manqué à son obligation de loyauté en créant une entreprise concurrente à celle de son employeur sans prévenir celui-ci et ce, peu important que des actes de concurrence déloyale ou de détournement de clientèle aient été ou non établis.

 


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Indemnité de préavis et manquement à l’obligation de reclassement en cas d’inaptitude non professionnelle (Cass. soc, 7 déc. 2017 n°16-22.276)

Il convient de rappeler qu’en cas de licenciement pour inaptitude non professionnelle, l’indemnité de préavis n’est pas due puisque le salarié ne peut pas exécuter son préavis. Le contrat de travail est donc rompu à la date de notification du licenciement. En revanche, l’ancienneté du salarié doit être calculée en prenant en compte le préavis (Cass. Soc. 22 nov. 2017 n°16-13.883)

La Cour de cassation rappelle dans cette affaire que dans l’hypothèse où le licenciement pour inaptitude non professionnelle est jugé sans cause réelle et sérieuse, le salarié est fondé à solliciter l’indemnité de préavis.

En effet, les juges considèrent que l’inexécution du préavis n’est plus du fait du salarié mais de celui de l’employeur qui a manqué à son obligation de reclassement.

 


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Décision implicite d’homologation d’une rupture conventionnelle et délai de forclusion (Cass. soc. 6 déc. 2017 n°16-10.220)

Dans cette affaire, la question posée à la Cour de cassation était de savoir à compter de quelle date courait le délai de prescription d’un an pour contester une rupture conventionnelle dont l’homologation de la Direccte avait été implicite.

Le salarié avait sollicité l’annulation de la convention de rupture pour vice du consentement un jour après l’expiration du délai de prescription précité. Il faisait valoir qu’il n’avait pas eu connaissance du point de départ du délai de prescription dans la mesure où il s’agissait d’une homologation implicite (silence de l’Administration) et que le délai de prescription lui était donc inopposable.

La Cour de cassation a jugé la demande du salarié irrecevable car prescrite, estimant que la convention de rupture avait été signée et qu’il n'était pas contesté qu’elle avait reçu exécution et que par conséquent, le salarié avait disposé du temps nécessaire pour agir avant l'expiration du délai de prescription.

 


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Prise d’acte justifiée et indemnité pour irrégularité de procédure (Cass. soc. 23 nov. 2017 n°16-15.939)

La Cour de cassation rappelle ici que l’indemnité pour irrégularité de procédure n’est due que lorsque le contrat de travail est rompu par un licenciement.

Cette dernière en conclut donc logiquement qu’un contrat de travail rompu par la prise d’acte d’un salarié (même si cette dernière est ensuite requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse), ne peut pas donner lieu au versement d’une indemnité pour irrégularité de procédure.


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : Prise d’acte injustifiée et retrait d’avantages au salarié (Cass. soc. 9 nov. 2017 n°16-18.408)

Dans cette affaire, un salarié disposait de deux avantages (mise à disposition d’un bureau et détention des clefs de l’établissement) compte tenu de son ancienneté et de son statut.

Suite à une altercation, ces deux avantages lui avaient été retirés et le salarié avait alors considéré que ce retrait justifiait la prise d’acte de rupture de son contrat de travail aux torts de l’employeur.

Les juges du fond ont été suivis par la Cour de cassation qui a estimé que le retrait de deux avantages dont jouissait le salarié à raison de son ancienneté n'étaient pas d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail et justifier la prise d'acte de ce dernier aux torts de son employeur.

Ce retrait était certes considéré comme fautif mais non d’une gravité telle qu’il empêchait la poursuite du contrat de travail dans la mesure où les avantages ne constituaient pas de véritables outils de travail.

 


RUPTURE DU CONTRAT DE TRAVAIL : pouvoir du juge dans la qualification de la faute disciplinaire (Cass.soc., 20 décembre 2017, n°16-17.199 FS-PB)

La Cour de cassation a rappelé dans cette affaire les pouvoirs des juges dans la qualification de la faute disciplinaire. Ceux-ci ont la faculté de dégrader une faute grave en faute simple (Cass.soc., 6 juillet 2017, n°16-11.519), mais non l’inverse.

Pour la Cour de cassation « le juge ne peut aggraver la qualification de la faute retenue par l’employeur » dans le courrier de licenciement, même si celui-ci plaide une erreur de qualification qui aurait dû le conduire à licencier pour faute grave et même si les faits exposés pouvaient supporter la qualification de faute grave (en l’espèce, agressions verbales et physique d’une intérimaire).